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Raymond MARY-BASSET compagnon de la libération (1908-1984)

Mémoire

Il faut des situations exceptionnelles pour révéler des êtres exceptionnels. La Seconde Guerre Mondiale en révéla beaucoup et Raymond Basset fut l’un de ceux-là. Fasciné par le personnage avec lequel il s’entretint durant de longues journées, Joseph Kessel, autre aventurier des temps modernes, lui a consacré un chapitre de son livre Tous n’étaient pas des anges. [1]

Pour l’écrivain journaliste qui a toujours recherché la compagnie des hommes hors du commun, Raymond Basset était un fascinant personnage de roman, peut-être moins par le récit de ses invraisemblables exploits que par la découverte de sa surprenante personnalité où se mêlaient l’instinct des grands prédateurs et le culot de ceux qui affrontent la mort à la fois par patriotisme, par défi et par jeu.

DES POMPIERS DE CHALON-SUR-SAÔNE AUX PRISONS DE FRANCO

La première partie de la vie de Raymond Basset est d’une grande banalité. Rien qui puisse laisser imaginer le futur Compagnon de la Libération [2] .Né le 2 juillet 1908 à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), passé par une école professionnelle, il se destine à une carrière de technicien spécialiste de l’électricité. En mai 1928, il est incorporé au 134e régiment d’Infanterie par devancement d’appel et revient à la vie civile quatorze mois plus tard avec le grade de sergent. Il entre alors à la Compagnie Electrique de la Grosne, puis au Service des Eaux de la ville de Chalon-sur-Saône, se marie et devient père de trois enfants. Dix années sans relief particulier passent ainsi. A noter, toutefois, son engagement volontaire à la compagnie des sapeurs-pompiers de sa ville, de quoi donner du piquant à une existence provinciale rangée, mais surtout une activité qui va avoir quelque importance dans sa vie de combattant de la Libération.

Septembre 1939 - mai 1940. Pour Raymond Basset c’est aussi la "drôle de guerre". Il est d’abord mobilisé comme sergent dépanneur au 334e RI à Sierck-les-Bains (sud du Luxembourg) sur la frontière allemande et, avec sa soif d’action et d’émotions fortes, il devient rapidement le chef du corps franc de son régiment. Sa brillante conduite justifie sa proposition pour le grade de sous-lieutenant, mais une affectation spéciale le ramène à l’Atelier de Construction de Roanne en février 1940.

C’est là qu’il voit arriver, le 18 juin 1940, ceux qu’il ne cessera jamais d’appeler les « Boches » comme les appelaient son père qui tomba dans les premiers combats d’août 1914 et sa mère jusqu’à la fin de sa vie. Il n’avait que 6 ans et ce drame comme cette Première Guerre mondiale marquèrent son esprit de manière indélébile.

Refusant la défaite, il cherche immédiatement toutes les formes de lutte contre l’occupant. Sa connaissance de la région sud de Chalon-sur-Saône et ses fonctions d’adjoint à l’inspection des Services incendie du département de Saône-et-Loire coupé en deux par la ligne de démarcation font de lui, grâce à son Ausweis, un « passeur » particulièrement actif puisque, selon le texte lui attribuant la Croix de la Libération, « son inlassable ardeur [aura] permis à plusieurs milliers de prisonniers, d’évadés, d’agents des F.F.C., de pilotes alliés abattus, de rejoindre les territoires alliés ». En outre, depuis juillet 1940, il est entré dans le réseau belge Clarence. [3]

Les nombreux agents alliés et français qu’il rencontre ainsi le mettent rapidement en contact avec la France Libre et, après sept mois d’hôpital à la suite d’un accident lors d’une intervention de sapeur-pompier, il devient agent de divers réseaux, dont Brandy [4], de juin à décembre 1942. Mais ces activités, pourtant fort utiles à la cause alliée, ne lui suffisent plus et il décide avec son ami Résistant André Jarrot [5], garagiste à Chalon-sur-Saône, de rejoindre Londres où ils sentent que se joue l’essentiel de la lutte contre l’Allemagne.

D’ailleurs, pour Mary-Basset, il y a urgence. Il a été une première fois arrêté à Dijon en octobre 1942 lors d’un transport de postes émetteurs et a réussi à s’évader. Mais, au cours d’un de ses nombreux passages à Paris, il est à nouveau arrêté le mois suivant par la police vichyste et, cette fois, l’affaire se passe très mal. Sérieusement passé à tabac, il est livré à la Gestapo et de nouveau torturé. Bien mal en point, pas assez surveillé, sans doute en raison de son état, il parvient pourtant à assommer sa sentinelle allemande et à s’échapper des locaux où il est interrogé. Cette dernière arrestation décide de son premier départ avec André Jarrot pour l’Angleterre.

Profitant des filières du réseau Brandy et choisissant le long détour par l’Espagne, les deux hommes sont arrêtés au-delà des Pyrénées le 28 décembre 1942 et, comme des milliers d’autres évadés, ils connaissent les sinistres geôles de Franco au camp de Miranda. Libérés cinq mois plus tard, ils parviennent enfin en Grande-Bretagne le 7 juin 1943 en passant par Gibraltar (28 mai 1943). Raymond Basset est enfin à pied d’œuvre pour la véritable Grande Aventure de sa vie.

TROIS FOIS PARACHUTÉ SUR LA FRANCE OCCUPÉE

Brevet britannique Brevet FFL

Les deux brevets parachutistes portés par Raymond Mary-Basset en 1944 Sur la manche droite, le brevet britannique. Sur la poitrine à droite, le brevet FFL. (copyright F. Lescel).

Engagé immédiatement dans les Forces Françaises Libres (FFL) sous le pseudonyme de Claude MARY, Raymond Basset est une recrue de choix en raison de son patriotisme ardent, de ses connaissances techniques et de deux années d’expérience clandestine, interrompues, il est vrai, par cinq mois d’incarcération espagnole qui l’ont durci à toute épreuve. Son passage obligé par Patriotic School [6] n’a fait que confirmer la solide réputation de baroudeur qui l’a précédé à Londres. Il subit aussitôt un entraînement parachutiste intensif en vue d’une première mission et devient, le 3 juillet 1943, agent du service Action du B.C.R.A. [7]

Saboteur au Creusot

Le 16 août 1943, il est une première fois parachuté avec son inséparable André Jarrot (Cotre) près de Pionsat (Puy de Dôme, 70 km nord-est de Clermont-Ferrand) dans le cadre de la mission de sabotage Armada (destruction des installations industrielles travaillant au profit du potentiel de guerre allemand). Objectif : les usines du Creusot. Son pseudo du moment : Lougre ; celui de Jarrot : Cotre.

Appuyés par des Résistants de la région de Chalon-sur-Saône, les deux hommes sabotent deux semaines plus tard plusieurs installations électriques alimentant les usines de cet important complexe métallurgique travaillant pour l’industrie de guerre allemande, dont une centrale neutralisée pour six mois, et parviennent ainsi au résultat que 72 bombardiers Lancaster n’avaient pu obtenir pendant l’été 1942 mais qui firent cependant de nombreuses victimes civiles (près de 400 morts et 600 blessés). Mission terminée, le binôme est aussitôt exfiltré par avion spécial bimoteur Hudson qui se pose sur le terrain Orion, près de Bletterans (Jura), dans la nuit du 14 au 15 septembre suivant. On ne saurait risquer trop longtemps la capture d’agents aussi précieux.
Cette première mission n’a pas duré un mois et les deux hommes sont de nouveau à la disposition du B.C.R.A.en Angleterre (15 septembre 1943).

Saboteur sur grande échelle

A nouveau parachutés dans la nuit du 7 au 8 novembre 1943 dans la région de Cormatin (16 km ouest de Tournus, Saône-et-Loire) pour une nouvelle mission Armada, Raymond Basset et André Jarrot mènent ensemble ou séparément une intense activité de sabotage pendant près de cinq mois au cours desquels chaque journée est marquée par un fait opérationnel important entre Paris, Reims, Troyes, Saint-Quentin, Soissons, Lyon, Chalon-sur-Saône, Montceau-les-Mines, Mâcon, Tournus, la Boisse (Ain), autant de régions qui subissent les destructions des deux hommes.

Partout, Mary-Basset organise et forme ses équipes, répartit les armes, matériels et explosifs parachutés, sabote des dizaines d’usines, d’installations électriques, de pylônes, de barrages, de voies navigables sur une étendue considérable du territoire. La neutralisation de la garde et la destruction du barrage de Gigny-sur-Saône (10 km nord de Tournus, Saône-et-Loire) dans la nuit du 10 au 11 novembre 1943 en est un exemple parmi des dizaines d’autres. A l’étude des archives et des comptes rendus de missions, on a peine à croire qu’un seul homme, qui circule avec une aisance incroyable sous de multiples fausses cartes d’identité, y compris celles de policier et de douanier, et avec les laissez-passer les plus divers, ait pu mener autant d’activités opérationnelles aussi risquées sans se faire prendre.

Et agent « multiservices »

Pendant toute cette période, Mary-Basset, aux sens et à l’imagination toujours en éveil, en liaison étroite avec Londres, saisit toutes les occasions pour attaquer le potentiel ennemi dans des domaines très divers qui ne relèvent pas directement de sa mission prioritaire de sabotage.

On le voit ainsi transmettre des renseignements de synthèse, détruire des dépôts de locomotives, opérer des déraillements, éliminer de nombreux agents de la Gestapo, liquider des voitures chargées d’Allemands, coordonner les actions de guérilla de plusieurs départements dont, en particulier, le Rhône, l’Ain, la Saône-et-Loire et le Jura. Et tous ces faits de guerre, simplement, tranquillement, « en passant » !. Partout où « passe » l’insaisissable Lougre, l’ennemi subit des dégâts et sa tête est mise à prix à deux millions de francs de l’époque.

Aussi bien, la phrase célèbre de Churchill concernant les pilotes de la R.A.F. qui menèrent la bataille aérienne d’Angleterre au cours de l’été 1940 pourrait-elle lui être appliquée, comme à son ami André Jarrot, pour souligner l’action de ces hommes d’une audace incroyable au profit du plus grand nombre.

Rappelés en Angleterre, Mary-Basset et André Jarrot ne peuvent utiliser la voie aérienne à la suite d’un incident au sol de l’avion de liaison et doivent emprunter une nouvelle fois le long chemin par l’Espagne où ils ne séjournent que trois jours, à la fin mars 1944, Franco ayant entre temps tiré les conséquences de la proche défaite de l’Allemagne. Ils sont de retour au B.C.R.A. le 5 avril 1944.

A elles seules, ces deux missions de sabotages en France, dont la seconde fut particulièrement longue et dangereuse, ont justifié l’attribution aux deux héros de la Croix de la Libération qui leur est remise ensemble dès le 16 juin 1944. Pour Mary-Basset, le texte d’accompagnement porte la mention suivante : « A accompli de très nombreux et très importants sabotages contre l’industrie allemande en territoire français. Leur extraordinaire réussite a permis de stopper pour plusieurs mois des industries de première importance pour l’effort de guerre allemand. ». [8]

DÉLÉGUÉ MILITAIRE ET COMMANDANT FFI DU RHÔNE

Lyon, place Bellecour, 5 septembre 1944. Prise d’armes de la Libération, présidée par le général d’armée Jean de Lattre de Tassigny, commandant de l’armée B débarquée en Provence. Le Commandant Raymond Mary-Basset porte son uniforme de saut du 9 juillet 1944 sur saphir, près de Duerne (Monts du Lyonnais).

Lyon, place Bellecour, 5 septembre 1944. Prise d’armes de la Libération, présidée par le général d’armée Jean de Lattre de Tassigny, commandant de l’armée B débarquée en Provence. Le Commandant Raymond Mary-Basset porte son uniforme de saut du 9 juillet 1944 sur saphir, près de Duerne (Monts du Lyonnais).
(Coll. J-P Basset. Reproduction interdite)

Mais l’ultime tâche reste à accomplir : la libération de la Métropole. Jarrot et Mary-Basset vont être une troisième fois parachutés mais leur destin va ici se séparer. Pas tellement sur le plan géographique et dans la nature de leur mission, car ils vont œuvrer à quelques dizaines de kilomètres l’un de l’autre. Le premier prend les fonctions de délégué militaire de Saône et Loire et va concentrer ses actions d’organisation des Maquis et de harcèlement sur la vallée de la Saône à hauteur de Mâcon - Tournus, tandis que le second, chef de la mission Gingembre, atterrit avec ses quatre compagnons [9] dans la nuit du 9 au 10 juillet 1944 sur Saphir, un terrain homologué près de Duerne (Monts du Lyonnais), non sans quelques difficultés météo.

Sa double mission

Initialement, Gingembre était pour lui une mission de liaison et d’organisation auprès des maquis du Rhône, puis de harcèlement des itinéraires de retraite allemande, comme l’était Cannelle en Saône-et-Loire pour son ami André Jarrot. Mais son efficacité, son courage tranquille, l’audience dont il disposait à Londres auprès du Général Koenig, commandant les F.F.I., en firent rapidement le véritable chef de la Résistance armée dans le Rhône. Dès les premiers jours, il n’eut pas seulement à animer et coordonner les actions des équipes S.A.S. [10] parachutées en août 1944 et des unités de Maquisards pour la destruction des voies de communications sur les principaux axes de repli sud - nord de la Wehrmacht ; il se trouva, de facto, chargé d’une seconde mission : harceler les troupes allemandes sur ces mêmes axes pour les ralentir et réduire leur capacité opérationnelle avant la bataille des Vosges et de l’Alsace.

Mary-Basset se met aussitôt à la tâche, prend les contacts avec tous les chefs de maquis de la région sans se laisser distraire par leurs différences et, souvent, leurs motivations politiques. Car, pour cet homme d’action, seul compte le résultat opérationnel. Et la liste des sabotages de voies ferrées, de lignes électriques et téléphoniques, des déraillements de trains, des destructions d’ouvrages routiers et ferroviaires s’accroît rapidement tandis que sont accueillies et mises en œuvre les équipes S.A.S. à mesure de leurs parachutages sur les différents terrains répertoriés (opérations Jockworth, Harrod et Barker ). Seuls les SAS de Jockworth ( une cinquantaine d’hommes aux ordres du Capitaine Pommier) passent directement sous ses ordres, tandis que ceux de « Harrod » et « Barker » relèvent de la Saône et Loire.

L’une de ses actions parmi les plus spectaculaires est, le 23 juillet 1944, la destruction totale et sans aucune perte amie, en gare de Reventin-Vaugris, au sud de Vienne (Isère), d’un train de 46 wagons-citernes de carburant constituant toute la réserve de la Luftwaffe dans le sud-est de la France après l’élimination de son détachement de protection allemand sur 5 wagons d’escorte. Entre la localisation du train, difficile par voie aérienne, l’acheminement du renseignement, les reconnaissances, le montage de l’opération et son exécution, il n’a pas fallu plus de cinq jours. Cette opération et beaucoup d’autres montrent la rapidité d’analyse et de décision puis la hardiesse et la précision d’exécution du commandant Mary. Un sans faute absolu pour une quinzaine d’hommes résolus (5 paras et un complément de maquisards de l’AS).

Avec la même détermination et la même audace, beaucoup d’autres opérations sont ainsi menées à bien sous son impulsion, comme les destructions du barrage de la Mulatière (Rhône), d’un train de blindés allemands dans le tunnel de Bully (Rhône), d’un autre train de blindés dans le tunnel de Givors (Rhône), encore un autre sous celui de Biesse (Loire), l’incendie d’un train à Limonest (Rhône) ou encore l’attaque de la gare et l’obstruction définitive du tunnel de Tarare (Rhône) après y avoir engagé plusieurs trains. Ainsi, progressivement, quelques jours après le débarquement allié en Provence du 15 août 1944, la mission initiale est-elle déjà largement remplie puisque la Wehrmacht a abandonné, au 23 août, tous les axes routiers et ferroviaires situés à l’ouest du couloir Rhône-Saône.

L’homme providentiel d’Alban-Vistel

Reste à accomplir la seconde mission, l’affrontement direct des colonnes allemandes en retraite qui doit conduire, en fin d’action, à la libération de la ville de Lyon. Pour cette tâche, les F.F.I. (Forces Françaises de l’Intérieur) du Rhône se heurtent à deux handicaps majeurs que leur chef régional Alban-Vistel [11] a bien du mal à surmonter : la faiblesse des moyens armés, encadrés et entraînés et plus encore les rivalités de clans et de personnes accentuées des ambitions politiques.

Le 18 juillet, Alban-Vistel nomme Mary-Basset Commandant des F.F.I. du Rhône.

Il s’en félicitera « dès la fin juillet » lorsque « certains dont les compétences relevaient d’un tout autre domaine, se sentant vocation de chef de guerre, intimaient ordre à notre chef départemental F.F.I. de déclencher l’insurrection dans la ville [...] Fort heureusement, Mary-Basset fut discipliné et sous les traits du baroudeur ne cessa jamais d’apparaître un homme de raison ». [12]
Dans la phase ultime d’approche et de concentration des Maquis régionaux sur Lyon, Alban-Vistel dépense beaucoup d’énergie et de conviction à coordonner les mouvements et à imposer sa volonté. Il apprécie d’autant mieux la vivacité d’esprit et la rigueur d’exécution de son subordonné qui a parfaitement compris le type d’actions à mener : « Il est avant tout un baroudeur, excellent entraîneur d’hommes. Il excelle dans cette guerre de raids audacieux et courts, d’embuscades ; il prépare ses coups avec un sérieux où se mêle souvent une forte proportion d’humour. Au prix de pertes limitées, il obtient d’excellents résultats, sans pour autant négliger la manœuvre qui consiste à resserrer progressivement le dispositif F.F.I. de Givors à Francheville ». [13]
A ce pertinent résumé de Raymond Mary-Basset et de ses actions de guerre ajoutons simplement qu’il avait un sens aigu de l’organisation et une lumineuse expression de sa pensée, comme le montre l’étude des documents d’archives signés de sa main.
Le 3 septembre 1944 à l’aube, commandant toutes les forces des maquis à l’ouest du Rhône et de la Saône, il pénètre dans Lyon à la tête de ses parachutistes et de ses maquisards au moment où les derniers Allemands qui, la veille au soir, ont achevé de faire sauter les ponts se replient au nord. Il parvient à l’Hôtel de Ville vers 8 heures.

Le commandement régional rapidement mis en place lui confie la mission d’organiser la prévôté militaire. Sa tâche accomplie, il ne s’attardera pas longtemps sur les lieux de ses exploits et rejoindra une troisième fois le B.C.R.A. à Londres, le 14 septembre 1944, pour de nouvelles missions.

LE COMPAGNON DE LA LIBÉRATION

Tous les combattants de la Résistance qui ont connu Mary-Basset sous différents pseudonymes (Mary, Lougre, Gourmette et bien d’autres... ) et n’ont souvent pu l’identifier qu’après la guerre sont unanimes sur les qualités exceptionnelles de l’homme et du chef. On pourrait en citer des milliers tant furent nombreux ceux qui vécurent auprès de lui « les oppressants états d’âme [...] lorsque, au fil des heures de leur lutte, venaient alterner, souvent sans transition, la longue attente et l’action spontanée, l’indécision et l’audace, la désespérance et l’esprit fou, les grandes douleurs et les plus belles joies. [14]
Citons seulement l’un d’entre eux, Joseph Besson (Bertrand), le chef de l’équipe S.A.P. [15]de St-Symphorien-sur-Coise (Rhône) qui le réceptionna à son troisième parachutage. Son « visage exprimait une extraordinaire impression de force, de cran, de volonté, d’assurance... en un mot un chef ».

Le Colonel Raymond-Basset était :
Grand Officier de la Légion d’Honneur ;
Compagnon de la Libération (16 juin 1944) ;
Grand Officier de l’Ordre national du Mérite.

Il était décoré de :
la Croix de Guerre 1939-1945 avec nombreuses citations dont 4 palmes ;
la Médaille de la Résistance avec rosette ;
la Médaille des Evadés.
Les Alliés avaient aussi reconnu ses immenses mérites en lui attribuant de prestigieuses décorations, dont :
la DSO (Distinguished Service Order, GB), 17th October, 1945 ;
la Military Cross (GB), 10th November 1943 ;
la Croix de Guerre belge ;
la Médaille de la Résistance belge avec rosette.

Raymond Mary-Basset est décédé le 11 septembre 1984 à Chessy-les-Mines (Rhône). Selon ses dernières volontés, il a été inhumé au cimetière de Saint-Symphorien-sur-Coise, au plus près de sa dernière zone de parachutage de juillet 1944 et dans la plus grande discrétion. Sur son cercueil, uniquement la Croix de la Libération et son béret amarante de parachutiste.
Après la guerre, il avait milité dans de nombreuses associations patriotiques liées à la France Libre et à ses réseaux Action. Il avait consacré ses dernières années à resserrer les liens entre ses anciens camarades de combat et leurs familles.

Un héros, un pur.

F.L.
Miribel, le 7 janvier 2005.

Croix de la libération D.S.O (Distinguished Service Order)

BIBLIOGRAPHIE ET SOURCES:
Ordre de la Libération, notices biographiques officielles de Auguste Alban-Vistel, Maurice Bourgès-Maunoury, Pierre Château-Jobert, André Dewavrin, Pierre Guilhemon, André Jarrot, Raymond Mary-Basset.

Alban-Vistel (Auguste),La Nuit sans Ombre, Paris, Fayard, 1970, pages 466 et suivantes

Alban-Vistel (Auguste), La Résistance dans le département du Rhône, 1970.

Besson-Bertrand (Joseph), Chronique des années sombres, p. 239 à 246

Flamand (Roger, colonel), Paras de la France Libre, Paris, Presses de la Cité, 1976.

Lescel (François, général), Objectif Lyon, Lyon, DG Communication, 2004.

Archives nationales, BCRA.

Comptes rendus de missions Armada I et II.

Journal de marche du Commandant Mary, période du 9 juillet au 3 septembre 1944.

Archives départementales du Rhône, Commission Histoire de la Guerre.

NOTES:
[1] Editions Plon, 1966

[2] Lire aussi sa notice biographique sur le site de l’Ordre de la Libération. http://www.ordredelaliberation.fr/fr_doc/liste_biographie.htm

[3] Fondé le 18 juin 1940 en Belgique par Walthère Dewé et spécialisé dans le renseignement au profit des services britanniques et dans l’organisation de filières d’évasion d’agents et d’équipages abattus en territoires occupés.

[4] Réseau spécialisé dans le franchissement de la ligne de démarcation sous toutes ses formes (agents, aviateurs alliés, documents...) constitué en 1942 avec les frères Martell ( Christian et Maurice) et Pierre Guilhemon.

[5] André Jarrot (1909 - 2002, pseudo Jean Goujon) et Raymont Basset se sont maintes fois rencontrés avant la guerre dans leur jeunesse, au cours de leurs études et dans leur milieu professionnel électromécanicien. Sur cet autre personnage exceptionnel, consulter la notice biographique de l’Ordre de la Libération (Voir note 2 ci-dessus)

[6] Enceinte discrète et protégée d’un ancien collège installée à Harmsworth, dans la banlieue londonienne, où séjournaient, le temps très variable d’une enquête approfondie, tous les étrangers parvenus par des voies diverses sur le sol britannique pour l’indispensable tri entre les vrais « patriots » et les espions infiltrés.

[7] B.C.R.A., Bureau Central de Renseignement et d’Action, rattaché directement au Général de Gaulle, dont le chef était le colonel André Dewavrin (Passy).

[8] On notera que le texte de la Décision d’attribution, signé du Général de Gaulle le 16 juin 1944, ne pouvait prendre en compte les nombreuses actions ultérieures de Mary-Basset, d’une toute autre importance sur le plan des opérations militaires dans la phase de libération.

[9] Daniel Boutoule (Rivière), adjoint de Mary-Basset, Marcel Réveilloux (Bonhomme, Piège), Dominique Zanini (Scarificateur, Zolard) et son radio Michel Castets (Cafre, Castens). Réf. AN 3AG2/400-BCRA - Dossier N°16.

[10] S.A.S., Special Air Service, organisation britannique d’unités de commandos, constituées de volontaires à la sélection particulièrement rigoureuse et à l’entraînement parachutiste intensif. Leur origine remonte à juin 1941 où un officier écossais, David Stirling, propose la constitution de petites équipes de 4 à 6 hommes aptes à agir en profondeur derrière les lignes ennemies. Les premières sont mises sur pied en décembre de la même année. L’année suivante, elles agissent dans le désert de Libye contre les bases logistiques et d’aviation de l’Afrikakorps. A la suite de cette expérience réussie, sont constitués progressivement en 1944 pour le théâtre européen cinq régiments SAS, 1er et 2e SAS (britanniques), 3e et 4e SAS (français), 5e SAS (belge). Ils sont engagés successivement en Italie en fin 1943, surtout en France en juillet et août 1944. Chaque régiment comprend entre 4 et 5 squadrons de plusieurs sticks (6 à 10 hommes).

[11] Auguste Vistel (Alban, Magny, Hectare, Richard. 1905 - 1994), Compagnon de la Libération, chef civil et militaire de la région de Résistance R1 à compter du 15 juillet 1944. R1 comprenait alors les 8 départements actuels de Rhône-Alpes plus la Saône-et-Loire et le Jura.

[12] Alban-Vistel, La nuit sans ombre, page 544, Paris, Fayard, 1970.

[13] ibid

[14] Mary-Basset, préface à Chronique des années sombres, de Joseph Besson, 1983.

[15] S.A.P., Service Atterrissage et Parachutage chargé des reconnaissances de terrain, des dossiers d’homologation, des liaisons aériennes et des balisages, des réceptions et dispersions des parachutages

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