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LE DRAME DE L'ARMÉE FRANÇAISE DU FRONT POPULAIRE A VICHY

Mémoire

Ce nouveau livre de Gérard Chauvy, qui vient de paraître chez Pygmalion (*), a sûrement demandé à son auteur de longues années de recherche et beaucoup de méditation, tant sont vaste le sujet, complexes les problèmes, difficilement saisissables les personnages politiques et militaires mis en œuvre. Belle opportunité, à 70 ans des événements, de parler de ce « drame de l’armée française ». La plus grande défaite de l’histoire de cette armée, mais aussi la plus inattendue et la plus incompréhensible chez ses alliés, chez ses ennemis et dans ses propres rangs. Car il s’agit bien de la campagne de mai et juin 1940 qui s’est achevée le 21 juin dans ce même wagon de Rethondes qui avait accueilli les plénipotentiaires allemands 22 ans plus tôt.

Comment expliquer une telle catastrophe ? C’est toute la tâche de Gérard Chauvy. Et plus le désastre est grand, plus les causes sont multiples, profondes, voire lointaines. C’est pourquoi, l’auteur consacre sa première partie « Grandeur et décadence (1918-1936) », 130 pages, à l’analyse des conséquences de la « victoire » reconnue et célébrée de l’armée française à l’issue de la Première Guerre mondiale. Cette partie est, en effet, essentielle pour comprendre la situation matérielle et psychologique dans laquelle se trouve l’armée française au moment de son entrée dans la guerre en septembre 1939. Situation trompeuse et en réalité médiocre qui résulte de désastreux choix politiques et de l’influence négative et illusoire exercée par les grands vainqueurs de 1918, notamment Pétain et Weygand auxquels le pays aura pourtant recours en pleine tourmente.

La deuxième partie du livre analyse ce que Gérard Chauvy appelle « une guerre interne ». Elle concerne la période 1936-38 du Front populaire et les conséquences pour la France de la guerre d’Espagne.

En entrant dans la troisième partie, « une guerre orpheline » (page 283), le lecteur observe que les plus lucides des hommes politiques français ne se font plus guère d’illusion sur le régime nazi et sur l’avenir de la paix en Europe. Nous sommes à la fin de 1938. Daladier est pour la troisième fois président du Conseil et il cumule aussi les fonctions de ministre de la Guerre et de la Défense nationale. Il a ramené à Paris, le 30 septembre, le fameux « accord » de Munich qui sauve pour quelques mois la paix. Nous allons à petits pas dans « la guerre à reculons ». L’auteur analyse sans détour la situation des effectifs et des armements et montre qu’il est désormais trop tard pour rattraper le temps perdu, d’autant plus que se développe parallèlement ce qu’il appelle la « guerre des généraux ». Alors que la mobilisation a finalement eu lieu en septembre 1939, que la Pologne a été vaincue en trois semaines et que l’on s’est installé dans la Drôle de Guerre, apparaît en pleine lumière le personnage du colonel de Gaulle dont les activités et les écrits sont analysés dans le détail.

La quatrième partie, « l’armée française ou l’illusion du pouvoir », conduit directement à l’offensive allemande du printemps 1940. Les faisceaux d’observation se concentrent sur la personnalité de Gamelin, ses plans, ses méthodes de travail et ses décisions jusqu’à son limogeage en pleine débâcle. Réapparaît alors Weygand « dans le panier de crabes », tandis qu’au gouvernement les Français affolés voient surgir le personnage de Reynaud. L’auteur analyse la « faillite politique » consécutive à la défaite, les circonstances de l’arrivée au pouvoir de Pétain, la fin de la République et comment et en quoi l’armée de l’armistice devient celle de la « révolution nationale » mais aussi une « armée éclatée ».

Cet ouvrage n’est, hélas !, pas un roman car il décrit la stricte réalité des années 30 qui ont conduit inexorablement à la défaite de 1940. Il en a pourtant les accents et la trame, tant apparaissent nombreuses au fil des pages les intrigues, les rivalités, les luttes sans merci entre personnages d’exception.

F.L.
(*) 696 pages, 24,90 euros. 

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