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LA MÉDAILLE DES ÉVADÉS

Mémoire

LES PRISONNIERS DE GUERRE

Les différentes conventions passées aux XIXe et XXe siècles entre des états permirent de fixer le sort qui serait dévolu aux prisonniers de guerre en considérant que ces derniers cesseraient d’être des ennemis ou instruments de l’ennemi et redeviendraient simplement des hommes et qu’ainsi, il ne pourrait plus être attenté à leur vie. Mais rien n’a jamais été stipulé sur le point précis qu’un prisonnier de guerre ne devait pas chercher à s’évader. Il était parfois demandé à un chef militaire qui avait été fait prisonnier de donner sa parole d’honneur de ne pas tenter une évasion. La plupart du temps, celui-ci refusait et, de ce fait, il était souvent emprisonné dans une forteresse, comme ce fut le cas du général allemand FREISE, fait prisonnier lors de la victoire de la Marne en 1914. N’ayant pas voulu donner sa parole de ne pas s’évader, il fut interné au château d’If à Marseille.
Lors de la Grande Guerre de 1914-1918, le nombre des soldats français prisonniers détenus en Allemagne s’éleva à environ 557.000 hommes. Mais les conditions de détention étant particulièrement dures, surtout dans les camps de représailles réservés à ceux qui avaient fait des tentatives d’évasion, il semble que le pourcentage de réussite des évasions ne fut pas élevé. Il faut toutefois citer celle du futur général GIRAUD. Fait prisonnier en août 1914, il s’évada le 30 octobre, traversa la Belgique et la Hollande et gagna l’Angleterre d’où il revint en France en février 1915 pour reprendre le combat.


LES ORIGINES


A la fin de ce premier conflit mondial, des associations d’évadés de la guerre 1914-1918 se créèrent et ce sont elles qui, au cours de l’automne 1925, poussèrent un député, M. Marcel Plaisant, à déposer une proposition de loi tendant à créer une médaille spéciale entraînant l’attribution de la Croix de Guerre pour récompenser ceux qui se sont évadés.
Cette proposition fut soutenue à la Chambre des Députés (Assemblée Nationale de l’époque) par M. Ricolfi et au Sénat par M. Palisse. Elle devint la loi du 26 août 1926 créant la Médaille des Evadés.

DESCRIPTION

La Médaille des Evadés, due au graveur A. Dubois, est en bronze du module de 3 cm. A l’avers, elle porte l’effigie de la République Française et, au revers, une couronne de feuilles de chêne avec au centre l’inscription MEDAILLE DES EVADES. Elle est suspendue par un anneau à un ruban vert d’une largeur de 36 mm, avec trois raies oranges dans le sens de la longueur. Celle du milieu a une largeur de 7 mm et celles en bordure de 2 mm.
Le décret du 2 juin 1948 précise que, dans l’ordre des décorations officielles, la Médaille des Evadés se place après la Croix du Combattant. Il n’y a aucun cérémonial obligatoire pour la remise de cette décoration.

ATTRIBUTION

Après la guerre de 1914-1918

La loi du 26 août 1926 attribuait la Médaille des Evadés pour les actes d’évasion accomplis par les militaires prisonniers de guerre lors de la guerre de 1914-1918 ou sur l’un des théâtres d’opérations extérieurs. Elle fut aussi appliquée :

aux Alsaciens Lorrains échappés des rangs de l’armée allemande entre le 1er août 1914 et le 1er novembre 1918 pour se réfugier sur le territoire français non occupé.

aux prisonniers civils internés, ainsi qu’aux habitants des régions envahies qui avaient traversé les lignes du front ou franchi les frontières pour se mettre à la disposition de l’autorité militaire française.

Enfin cette décoration pouvait être aussi attribuée aux prisonniers de guerre transférés en Allemagne qui s’étaient évadés pendant la guerre de 1870-1871.

L’attribution était soumise à l’avis d’une commission interministérielle et la décision la conférant était accompagnée d’une citation avec la Croix de Guerre de 1914-1918 ou celle des T.O.E (théâtres d’opérations extérieurs). Mais cette citation annulait les autres citations qui auraient pu être déjà attribuées pour des évasions. Les dossiers concernant les demandes d’attribution de cette décoration étaient suivis par les ministères de la Guerre et de la Marine pour le personnel militaire et par celui de l’Intérieur pour les prisonniers civils internés et les Alsaciens Lorrains.

Les délais pour la présentation des demandes ayant été reportés plusieurs fois, c’est enfin une loi du 17 avril 1932 qui confia au Ministère de la Guerre les décisions d’attribution de la Médaille des Evadés. Environ 16.000 prisonniers de guerre obtinrent cette décoration.

La loi du 20 avril 1936 permit aux Alsaciens Lorrains, prisonniers civils (hommes ou femmes) qui s’étaient évadés, avaient été repris par les Allemands et condamnés, de pouvoir obtenir cette médaille avec une citation, mais sans Croix de Guerre. En outre, cette loi institua une commission nommée par le Ministère de l’Intérieur chargée d’examiner les demandes à titre civil. Enfin, elle prévoyait l’obtention de la Médaille des Evadés sans Croix de Guerre pour des étrangers évadés avec des Français ou qui, évadés eux-mêmes, auraient permis l’évasion de Français.

Après la guerre de 1939-1945

La loi du 30 octobre 1946 précisa les conditions dans lesquelles, pour l’obtention de la Médaille des Evadés, s’appliqueraient les lois d’après la guerre de 1914-1918 pour les évasions accomplies entre le 2 septembre 1939 et le 8 mai 1945.

Ces conditions sont les suivantes :

Le candidat à cette médaille doit s’être évadé d’un endroit situé à l’intérieur d’une zone occupée ou contrôlée par l’ennemi avec franchissement clandestin et « périlleux » d’un front de guerre ou d’une ligne douanière.

Ou avoir tenté à deux reprises de s’évader des camps ou établissements militairement gardés et subi des peines disciplinaires ou la déportation dans un camp de représailles comme celui de Rawa Ruska

Les prisonniers civils évadés de France ou d’un camp et établissement situés en France avant leur transportation en Allemagne doivent justifier s’être engagés par la suite dans une unité combattante ou avoir été membres d’une organisation de la Résistance. Par contre, les prisonniers de guerre (sous réserve de leur attitude patriotique) n’ont pas à fournir cette justification.

Dans des cas exceptionnels la Médaille des Evadés pourra être accompagnée d’une citation avec Croix de Guerre.

La loi du 30 octobre 1946 précisait aussi qu’il y aurait des représentants de l’Union Nationale des Evadés de Guerre, de l’Union des Evadés de France, du Conseil National de la Résistance et de la Fédération Nationale des Evadés de Guerre dans la Commission d’examen des demandes d’attribution.

Le décret du 15 février 1951 transféra au Ministère des Anciens Combattants les attributions du Ministère de l’Intérieur concernant les candidats à titre civil. Comme en 1914-1918, les Alsaciens Lorrains qui avaient fui leur région occupée pour échapper à l’enrôlement dans l’armée allemande purent prétendre à la Médaille des Evadés. Enfin le décret N° 81-1156 du 28 décembre 1981 a levé sans condition de délai la forclusion frappant les demandes d’attribution.

Actuellement la Médaille des Evadés est attribuée par le Ministère de la Défense (Bureau des décorations) après avis d’une Commission. Un bilan établi le 17 novembre 1947 fait état de 1.580.000 prisonniers de guerre transférés en Allemagne dans des stalags et des oflags (pour les officiers). Parmi les captifs on compta 25.000 officiers dont la moitié de réserve et 170 généraux. Environ 70.000 s’évadèrent et au 1er janvier 1996 il est fait état de 39 260 qui obtinrent la Médaille des Evadés. C’est au cours de cette guerre que le général GIRAUD commandant la 9e armée, fait prisonnier le 19 mai 1940, s’évada le 17 avril 1942, comme il l’avait fait 28 ans plus tôt, et gagna Alger le 9 novembre.

La guerre d’Indochine

Les conditions de détention des 21.220 prisonniers de guerre par le Viet-Minh ayant été parmi les plus pénibles et celles pour une évasion parmi les plus difficiles à partir de camps comme le « camp n°1 » de triste renommée, les évasions étaient presque impossibles. En outre, les prisonniers évadés repris étaient souvent exécutés après une condamnation à mort par un tribunal du peuple. Après la chute de Diên Biên Phu, les 9 500 prisonniers dont la moitié de blessés ont été soumis à une marche de près de 1000 kilomètres pendant 40 jours.
Il est vrai que le Viet-Minh ignorait ou semblait ignorer les conventions qui doivent protéger les prisonniers de guerre.

La loi N° 89-1013 du 31 décembre 1989 donna le statut de prisonniers de guerre du Viet-Minh aux militaires et ressortissants français évadés entre le 16 août 1945 et le 20 juillet 1954, quelle que soit la durée de leur détention. Les conditions concernant les évasions accomplies sur des théâtres d’opérations extérieurs étant toujours valables, ces évadés purent prétendre à l’obtention de la Médaille des Evadés.

Bibliographie

FREMY (Dominique et Michèle), Quid , éditions Laffont, Paris, 1997.
GIRAUD (Henri, général), Mes évasions, Julliard, Paris, 1946.
GOUHIER (Pierre), Les militaires, éditions universitaires, Paris, 1983.
MASSON (Philippe), Histoire de l’armée française de 1914 à nos jours, Perrin, Paris, 1999.
MIQUEL (Pierre), Les Poilus, Plon, Paris, 2000.
Monnaie de Paris, Les décorations officielles françaises, Imprimerie Nationale, Paris, 1956.
POUGET (Jean), Le manifeste du camp N°1, Fayard, Paris, 1969.
REMY (colonel), Les terribles journées de mai 1940, éditions Christophe Colomb, Paris, 1984.
THEVENET (Amédée), Goulags indochinois, Carnets de guerre et de captivité, Paris, France-Empire, 1997.

 

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